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Quatorzième producteur mondial et quatrième producteur européen de papiers et cartons, la France est un acteur en déclin depuis plusieurs décennies, de façon plus précoce et plus marquée que ses partenaires européens, notamment l’Allemagne mais aussi l’Espagne ou l’Italie. Depuis de nombreuses années la collecte des papiers cartons à recycler s’est développée en France à un niveau très supérieur à la moyenne européenne (plus de 80 % vs. 72 %) assortie d’un taux d’incorporation élevé (rapport de la quantité de papiers recyclés à la quantité produite : 68 % vs. 52 %). En revanche, un excédent de produits collectés a été constaté depuis les années 2000, il décline légèrement depuis une dizaine d’années mais reste de l’ordre de 1.5 million de tonnes, soit un peu plus de 20 % de la collecte totale. L’industrie papetière est composée de quatre secteurs distincts : les papiers graphiques en fort déclin, les papiers cartons d’emballage et de conditionnement en croissance significative, les papiers d’hygiène en croissance faible et les papiers spéciaux stables. La consommation de papier par habitant diminue dans les pays développés, souvent plus fortement à l’étranger qu’en France. Il s’agit d’une industrie de base, fortement capitalistique et très spécialisée. Des reconversions sont possibles mais elles sont longues, onéreuses et difficiles. Enfin, les entreprises françaises sont désormais très majoritairement sous contrôle étranger. Cette filière est fortement consommatrice d’énergie sous forme de chaleur et d’électricité ; elle est très adaptée à leur production conjointe par cogénération. Les types de papiers sont eux-mêmes très différents par leurs exigences de résistance, d’imprimabilité, d’opacité, d’absorption ou de douceur, lesquelles correspondent à des types de fibres cellulosiques distincts et secondairement à des charges ou additifs variés. En conséquence, l’incorporation des fibres recyclées varie selon les types de papiers cartons produits car elle est soumise à de nombreuses contraintes techniques. Elle est facile et élevée pour l’emballage et le conditionnement ou pour les supports graphiques pour journaux et imprimés publicitaires (avec des taux d’incorporation supérieurs à 90 %) ; elle est plus réduite pour les papiers d’hygiène (moins de 30 %) et faible pour les autres papiers graphiques, notamment à usages bureautiques (10 à 15 % seulement). Le papier ou la pâte se transportent assez bien tandis que les produits intermédiaires ou finis doivent souvent être fabriqués localement. La production de papier est associée à ses utilisateurs, notamment l’industrie pour les emballages de ses produits finis. Pour cette raison, la filière souffre directement des difficultés économiques et de la désindustrialisation françaises. Le redressement de la filière papetière en France appelle plusieurs séries de mesures. Certaines sont partagées avec l’ensemble de l’industrie française et n’ont donc pas été particulièrement approfondies par la mission : fiscalité, pesanteurs et délais administratifs, etc. Des réponses sont apportées par l’actuel « plan de relance et de réindustrialisation ». La mission souligne le caractère potentiellement destructeur pour le tissu industriel de taux minima d’incorporation qui seraient fixés sans une analyse approfondie des coûts/bénéfices économiques et écologiques et sans une concertation préalable étroite avec l’ensemble des parties prenantes. En complément, le secteur de l’hygiène présente un potentiel qui ne pourra être valorisé que si les Français sont dans le même temps sensibilisés à l’intérêt d’utiliser davantage de papier recyclé. Les opérateurs industriels ont mis en avant l’importance des coûts de l’énergie pour leur production (de 10 à 30 % selon les périodes). Plusieurs mesures d’accompagnement spécifiques sont plus faciles à mettre en œuvre : La filière a un grand besoin de recherche-développement pour surmonter les obstacles à des emplois accrus du papier, notamment pour les emballages alimentaires, ainsi que pour développer de nouveaux usages du papier et de la cellulose. La collecte et le tri des papiers à recycler souffre d’une qualité imparfaite que l’éco-organisme CITEO et les autres acteurs (collectivités, industriels, entreprises de l’économie sociale et solidaire…) doivent relever. De même, la collecte insuffisante des papiers à recycler de qualité supérieure (bureautique) semble pouvoir être accrue auprès des entreprises. Le mécanisme des éco-contributions doit aussi être développé pour concourir aux évolutions nécessaires d’éco-conception en vue de substituer ces matières au plastique et aussi faciliter la collecte, le tri puis le recyclage des papiers cartons. Enfin la mission a rencontré d’importantes difficultés pour analyser les flux de matières entre les différents secteurs et acteurs de la filière puisque certaines données étaient totalement incohérentes. Une structure pour répondre à ce problème doit donc être organisée ou confortée à partir de ce qui existe.