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Dans la nuit du 25 au 26 septembre 2019, à Rouen, une partie du site de l’usine Lubrizol, installation classée pour la protection de l’environnement « Seveso seuil haut », ainsi que les entrepôts de l’entreprise voisine, NL Logistique ont été la proie d’un incendie de grande ampleur. Cet incendie, éteint en une douzaine d’heures, n’a fait aucune victime et n’a entraîné ni pollution majeure de la Seine, ni dommages directs extérieurs. Il a en revanche dégagé un très important panache de fumée et de suies qui s’est étendu jusque dans les Hauts-de-France et a suscité une très forte inquiétude, relayée par les interrogations des médias, dans la population. La mission a procédé, par ce retour d’expérience, à une analyse de la gestion de la crise. La bonne gestion opérationnelle de l’incendie, renforcée par l’expérience des services en charge de la planification opérationnelle, est le reflet d’une articulation efficace entre le préfet, directeur des opérations de secours, ses services et l’ensemble des acteurs impliqués. La stratégie mise en oeuvre apparaît parfaitement adaptée : contenir l’incendie, éviter toute victime et tout « sur-accident » et apprécier rapidement la toxicité immédiate des émanations. Au-delà des aspects de forme et modes de communication, les difficultés rencontrées pour l’alerte illustrent l’insuffisance des outils à disposition des autorités publiques locales. Comme prévu d’ici 2022, le système français d’alerte-information des populations doit inclure une composante de diffusion automatique sur les téléphones portables. L’analyse des effets de court terme a permis d’exclure rapidement un danger grave et immédiat pour la santé. Cependant, l’appréciation des effets de moyen et de long terme a été plus complexe. Il apparaît indispensable, pour améliorer la coordination, de s’assurer de la mise en place d’une cellule postaccidentelle au centre opérationnel départemental (COD), réunissant, sous l’égide du préfet, l’ensemble des acteurs concernés, dès les premières heures suivant l’évènement, puis de manière régulière au-delà de la période d’activation du COD. La mission propose également de faciliter la coordination interministérielle nationale sans obérer la gestion opérationnelle locale, notamment par la mise en place d’une instance nationale de coordination interministérielle formalisée, en soutien stratégique au préfet pour tous les aspects devant être gérés localement et centrée, pour ce qui concerne ses décisions, sur les aspects de portée nationale uniquement. L’importance de l’effort de communication de la part de l’État doit être soulignée. Cependant, cet effort considérable n’a pas suffi à contenir l’emballement des médias et des réseaux sociaux. Tout cela s’est inscrit dans un contexte historique de défiance vis-à-vis de la parole publique, renforcée par le manque de confiance envers l’industrie chimique. Il apparaît dans ce contexte que l’opportunité de renoncer à une forme de communication trop descendante, en mobilisant d’autres relais d’information, doit être saisie. La mission suggère quelques pistes de progrès comme : la création d’une « task force nationale d’appui » au niveau territorial et d’une cellule nationale responsable de la veille, et de la « riposte » en temps réel aux fausses informations ; faire évoluer les commissions de suivi de sites « Seveso », avec une représentation accrue du monde associatif, de façon à créer, hors temps de crise, un contexte plus favorable au développement de la confiance en temps de crise.