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Le Plan biodiversité adopté en juillet 2018 souligne la nécessité de porter un regard nouveau sur les sols. Il met notamment l’accent sur l’impérieuse exigence d’une limitation de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers pour atteindre l’objectif de « zéro artificialisation nette ». Il a pour ambition d’améliorer les connaissances sur la biodiversité des sols et de développer les pratiques agricoles et forestières permettant de conserver cette ressource, de la restaurer et de la valoriser. Son action 51 promeut l’établissement de diagnostics, afin qu’acquéreurs et fermiers bénéficient d’une information sur l’état des sols. La mission a été chargée d’examiner la situation d’autres pays européens et de proposer un déploiement de l’action 51 du Plan biodiversité. L’Union européenne se préoccupe des sols, même en l’absence d’une directive-cadre dédiée. Tous les pays mènent une politique des sols, dont une partie seulement est directement liée à l’application de textes communautaires. Aucun des pays européens ne présente de dispositions réglementaires imposant de porter à la connaissance des propriétaires fonciers et des exploitants agricoles une information sur la qualité des sols cultivés. En revanche, diverses initiatives reposant sur une caractérisation des sols et une information des usagers sont mises en œuvre pour des motifs de sécurité alimentaire nationale, de santé publique, d’aménagement du territoire ou de lutte contre le changement climatique. La connaissance sur les sols en France est bonne et est souvent citée en exemple à l’étranger. La multifonctionnalité des sols est de mieux en mieux connue dans le monde de la recherche. Toutefois, cette connaissance pénètre peu les sphères de décision, que ce soit pour la gestion des sols agricoles ou pour la consommation de sols agricoles par artificialisation. Les initiatives de caractérisation multifonctionnelle des sols font ressortir deux éléments constants : leur état structural et leur composition organique (abordée en termes de teneur en carbone, matière organique ou humus). Ce sont là des états et propriétés sous la dépendance des pratiques de l’agriculteur, contrairement à certaines caractéristiques pérennes du sol (granulométrie, profondeur…). S’y ajoute, mais de façon moins systématique, la question des polluants éventuels. Des initiatives territoriales tentent également d’intégrer la qualité multifonctionnelle des sols dans les politiques locales d’urbanisme, pour freiner l’artificialisation des sols ou pour inscrire leur gestion dans la logique « éviter, réduire, compenser ». Les exemples identifiés montrent que pour agir efficacement sur les menaces pesant sur les sols, il faut « éclairer » l’utilisateur ou le gestionnaire et faire en sorte que ses décisions soient prises en connaissance de leurs effets directs ou indirects sur l’état des sols. Le porter à connaissance est inopérant s’il n’est pas mis au service d’une politique de l’impact qui puisse responsabiliser le décideur et lui permettre de privilégier les options favorables au bon état des sols. Prendre en compte la complexité des sols dans une politique de l’impact nécessite d’une part de poursuivre les travaux de décryptage de cette complexité, par la recherche scientifique sur la multifonctionnalité des sols et la capitalisation de la connaissance acquise, et d’autre part de « simplifier cette complexité » pour la rendre accessible à tout usager et permettre ainsi de le responsabiliser, moralement mais surtout juridiquement et le cas échéant financièrement. Les outils d’aide à la décision en agriculture englobent une fonction informative et constituent des canaux du porter à connaissance, mais ils ne paraissent pas transposables aux usages non agricoles des sols. Une représentation très synthétique et visuelle de la qualité des sols, à l’image des étiquettes informatives développées dans les secteurs de l’alimentation ou de l’énergie, pourrait être un support de porter à connaissance à grande échelle. L’établissement généralisé de diagnostics d’état des sols, afin qu’acquéreurs et fermiers bénéficient d’une information sur l’état des sols, sera d’autant plus utile qu’il s’inscrira dans une politique ambitieuse de protection des sols, aux objectifs clairement identifiés et dotée de moyens suffisants. Partant de ces constats, la mission formule des recommandations pour améliorer l’information sur la qualité des sols agricoles et sa prise en compte. Elles sont articulées autour de trois axes : Poursuivre l’amélioration de la connaissance de la multifonctionnalité des sols et capitaliser les informations recueillies ; mener des actions d’amélioration de la gestion des sols à usage agricole ; mener des actions de protection des sols en cas de projet d’artificialisation des sols.