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La chlordécone est un insecticide organochloré qui a été utilisé en Guadeloupe et en Martinique pour lutter contre le charançon du bananier de 1972 à 1993. Toujours présente dans les sols, la chlordécone pollue durablement les écosystèmes via un transfert par l’eau et les plantes. Cette molécule, classée cancérigène possible en 1979, est considérée comme un perturbateur endocrinien. Depuis le début des années 2000, et la publication du premier plan en 2008, l’Etat met en œuvre des actions contre la pollution durable de la terre et des eaux et contre les risques qui en découlent pour la santé humaine et l’environnement. Alors que le plan III (2014-2020) n’est pas achevé et qu’une récente feuille de route (2019-2020) l’a complété, la mission interinspections a mené, dans l’hexagone et aux Antilles, une évaluation administrative, centrée sur l’observation des modalités et de l’effectivité de la mise en œuvre des actions prévues, ainsi que les résultats obtenus au regard des moyens déployés. Au vu de l’évaluation réalisée, la mission, recommande de revoir en profondeur le pilotage afin de créer une synergie entre toutes les parties prenantes autour d’une stratégie de lutte contre la pollution par la chlordécone : l’Etat, les collectivités territoriales et les différentes composantes du corps social (recommandations 1 et 2). En ce qui concerne le volet de la recherche, la mission préconise un nouveau comité scientifique associé aux comités de pilotage, dont les missions seront élargies. Il sera chargé de la définition de la programmation scientifique, du suivi et de l’évaluation des projets et de la coordination des équipes. La mise en œuvre d’appels à projets thématiques sera financée via le PITE avec une enveloppe de l’ordre de 2 M€ annuels permettant de soutenir en particulier des projets très finalisés, (recommandation 3). La complétude de la cartographie des sols pollués et celle des masses d’eau apparaît incontournable. Achever la cartographie des sols, en priorité celles des zones agricoles, polluées et non polluées, en assurant la prise en charge des analyses (recommandation 5) nécessite un effort financier de l’ordre de 30 M€. Pour mettre en œuvre l’orientation dessinée par le Président de la République de «tendre vers le zéro chlordécone dans l’alimentation», la mission propose de renforcer les contrôles de traçabilité et d’assurer au plus tard, en 2025, que les aliments produits localement et mis à la consommation via les circuits contrôlés ne contiendront aucune trace détectable de chloracétone. Elle nécessite d’intégrer, dans les recommandations adressées aux autoconsommateurs, les itinéraires techniques permettant de produire des aliments sans trace de chlordécone (recommandation 8). En priorité, la surveillance médicale des travailleurs de la banane doit être mise en œuvre sans délai et les procédures en vue de l’inscription du cancer de la prostate au tableau des maladies professionnelles doivent être conduites à leur terme (recommandation 10). Le programme Jafa doit être recentré sur l’accompagnement et le suivi des jardiniers amateurs, en complétant les analyses de sols et les recommandations des pratiques culturales. L’évaluation de ce programme doit précéder son éventuel élargissement (recommandation n°9). La mise en œuvre effective de la participation et de la coconstruction de la stratégie passe par un site d’information interactif réunissant l’ensemble des données actualisées sur les problématiques relatives à la chlordécone et par un dispositif interterritorial d’évaluation en continu, partagé par toutes les parties prenantes et reposant sur un comité d’évaluation indépendant (recommandation 11). Le soutien à la reconversion des agriculteurs et des pêcheurs doit être inséré dans des politiques publiques plus larges, via les programmes d’aides en vigueur sur la base de visions prospectives de développement des filières, ou via le plan Ecophyto II+ au besoin en adaptant ses dispositions (recommandation 4).