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La mission s’est intéressée au suivi biologique du loup et aux stratégies de prévention des attaques pratiqués dans quelques pays européens, afin d’améliorer la coexistence de l’espèce et de l’élevage en France - coexistence complexe dans tous les pays visités (Suisse, Italie, Espagne, Allemagne et Pologne), à l’exception de la Pologne comptant peu d’élevage ovin -. Les populations de loups se sont développées ces dernières années, ainsi que les attaques sur les troupeaux (ovins, mais aussi bovins), d’où des tensions de plus en plus vives, non seulement dans les zones avec présence ancienne du loup mais aussi là où il est présent de plus longue date. Les demandes d’une évolution de son statut de protection (au titre de la directive Habitats faune flore et de la convention de Berne) se multiplient. Aucun système de protection n’est infaillible, tant le loup est capable de s’y adapter ou de le contourner. Des dégâts subsisteront, même si les pays visités montrent que leur limitation est tout à fait possible. Trois caractéristiques constatées par la mission se dégagent de la comparaison conduite : la France détient de très loin les records du nombre de dommages (en valeur absolue ou rapportés au nombre de loups), du coût public de la protection, et du montant des indemnisations de dommages. Cette situation surprend nombre des interlocuteurs rencontrés et conduit à s’interroger sur l’efficience du système mis en place au fil des ans par notre pays. L’appui à la protection est beaucoup moins généreux dans les pays visités, lié à l’absence de mobilisation des budgets nécessaires mais aussi au fait que seuls les investissements ou les surcoûts par rapport à une activité hors présence du loup sont pris en compte, sans financement des bergers ou aide-bergers. L’appui à la protection est également plus exigeant dans la mesure où la mise en place effective des mesures décidées est partout contrôlée sur le terrain. L’indemnisation publique des dommages, lorsqu’elle existe, est toujours conditionnée à la mise en place de mesures de protection. Lorsqu’elle n’existe pas, les éleveurs ont la possibilité de recourir de façon volontaire à un système d’assurance privé, parfois en partie subventionné.Tout se passe donc comme si l’implication de l’éleveur et sa responsabilité dans la mise en place d’une protection efficace, étaient déterminantes pour minorer les dommages et leur coût public. Selon les principes d’implication et de responsabilité, il serait intéressant de réfléchir, dans le cadre de la révision en cours de la politique agricole commune, à faire évoluer notre système en instaurant un versement d’aides forfaitaires liées à la présence du loup et incluant une composante « dommages ». Une telle évolution devrait s’accompagner de la mise en place d’une gestion plus volontariste de la population lupine française, tout en suivant de près son bon état de conservation pour lequel la France a pris des engagements européens et internationaux. Plusieurs des pays visités se sont montrés intéressés par « l’exemple français » en matière de tirs létaux que de nombreux interlocuteurs considèrent comme un moyen de prévention complémentaire des dommages. Dans l’optique de faire bénéficier l’Europe de l’expérience acquise par la France, de sécuriser juridiquement son approche, et d’aller vers la mise en place d’une gestion adaptative de l’espèce, géographiquement différenciée, la mission recommande que la France s’implique dans le travail de révision en cours du guide interprétatif de la directive Habitats. La mission recommande qu’une série de mesures soit prise pour limiter le phénomène d’hybridation loup/chien au minimum bien que faible en France, et de génotyper tous les loups entrant dans les nombreux (une soixantaine) parcs à loups français. La communication autour du loup orientée vers la question même de sa coexistence avec les activités humaines, et souvent plus proche du terrain, paraît la plus féconde à la mission. Elle recommande la création d’un « observatoire national de la cohabitation du loup et des activités humaines » confié à un acteur tiers, accepté par l’ensemble des acteurs du sujet. Enfin, la mission encourage l’État à innover : en impliquant davantage les Régions dans les prises de décision concernant le loup afin de mieux les adapter aux contextes locaux ; en réfléchissant à organiser une conférence citoyenne sur la place du loup dans notre pays pour l’aider à éclairer les décisions futures.